Un an sous LaTeX - le bilan
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Date: 2018-06-25 18:41
Author: jdn06
Category: Formats libres
Tags: LaTeX, LibreOffice

Si  j’avais  un   peu  bidouillé  du  LaTeX   ces  dernières  années,
c’était  de manière  très  occasionnelle et  par  curiosité, en  vrai
dilettante.  Or  j’ai pris  la  décision  au  mois de  juin  dernier,
après quelques  tentatives plus concluantes, d’essayer  de n’utiliser
professionnellement, pour  l’année 2017-2018,  que des  documents que
j’aurai produits sous  LaTeX. L’année est terminée  ou presque ; j’ai
tenu l’engagement,  produisant en tout une  cinquantaine de documents
très variés : il est temps de faire un premier bilan.


LA DÉMARCHE

Précisons tout  d’abord que je  suis bien  conscient d’être un  peu à
contretemps : une décennie de retard (ou d’avance, qui sait ?)

- Si on fait une recherche  de type « LaTeX professeur de littérature
française »  dans un  moteur de  recherche, les  réponses pertinentes
seront  bien rares.

- Même  en mathématiques, je  ne connais aucun enseignant  de collège
qui utilise  au quotidien  LaTeX (alors que  la plupart  ont quelques
bases), alors des littéraires !

- Les associations  d’utilisateurs de LaTeX ne semblent  pas au mieux
de  leur forme.  En France,  Gutenberg semble  avoir considérablement
réduit ses activités,  ce qui est d’ailleurs assez  frustrant pour le
nouvel adhérent que je suis, quand  on voit les activités menées il y
a dix ans…

- Plus  anecdotique et amusant,  rechercher _The LaTeX  Companion_ en
librairie vous fait souvent passer  pour un fétichiste à la recherche
de son homme,  ce qui en dit  long sur la méconnaissance  de LaTeX, y
compris parfois chez le personnel du rayon informatique.

Mes objectifs l’an dernier :

1. Améliorer   la   typographie  de  mes   productions :  polices  et
ligatures, coupures  de mots, taille  des espaces insécables  etc.

2. Utiliser  Vim pour  travailler  (ou   plus  exactement  Neovim) et
pouvoir   au  besoin   éditer   directement  sur   mon  serveur   les
modifications à  faire — par  exemple quand je remarque  une coquille
dans un document et ne dispose que de mon téléphone portable.

3. Obtenir  exactement  ce que  je veux  sans avoir  à lutter  contre
l’outil.

4. Améliorer éventuellement ma productivité.


LE BILAN

1. Sur  plan de  la qualité typographique,  le bilan  est entièrement
positif et  le gain plus  spectaculaire qu’il n’y paraît.  Les textes
sur  lesquels les  élèves  travaillent me  paraissent  beaux et  plus
agréables à  lire, leur présentation  est plus cohérente.  Les élèves
n’en sont  pas forcément conscients,  mais certains semblent  tout de
même  valoriser davantage  leur support  écrit (moins  de photocopies
froissées ou  laissées dans la  salle après le cours,  pour m’appuyer
sur une  observation objective).

2. Le confort de n’utiliser qu’un éditeur de texte aussi efficace que
Vim est évidemment remarquable. Je me suis même mis parfois à rédiger
et compiler en  LaTeX sur une tablette Android 7  pouces avec clavier
externe, grâce au très remarquable  Termux. Bonne chance pour obtenir
quelque chose d’aussi  précis avec un traitement de texte  sur un tel
engin ! En utilisant un plugin pour Grammalecte la moindre efficacité
de la correction orthographique, par  rapport à celle de LibreOffice,
est en partie atténuée.

3. Les deux derniers points sont plus discutables :

-  S’il  est  plus  chronophage  au  début  de  rédiger  un  document
très  simple, comme  cinq phrases  d’exercices, sous  LaTeX que  sous
LibreOffice, le gain de temps  est considérable lorsque la complexité
du document s’accroît et qu’il n’est plus possible, sous LibreOffice,
d’obtenir quelque  chose de  correct qu’en multipliant  les retouches
manuelles. Un bon exemple de ce  genre de texte complexe ? Un extrait
de théâtre en vers ; il faut alors :

 * Bien centrer  les vers dans la colonne tout  en alignant à gauche
 et en évitant les vers trop longs.

 * Ne pas  compter les noms des personnages et  les didascalies dans
 la  numérotation  des  vers  et  offrir  une  typographie  qui  les
 distingue nettement.

 * Avoir une numérotation des vers  qui ne plante pas lorsqu’un vers
 est partagé entre deux personnages.

- Respecter  toutes  ces  contraintes avec  des environnements  LaTeX
comme Thalie et Verse par exemple, est assez trivial et rapide.

- Lorsqu’on  produit une  fiche structurée avec  titres, sous-titres,
points   et  sous-points,   exemples,   tableaux,  les   indentations
automatiques de LibreOffice sont  difficiles à piloter et nécessitent
beaucoup  de retouches  manuelles. Avec  LaTeX, la  structure produit
naturellement la disposition  si elle a été bien conçue.  On ne gagne
pas forcément  de temps, puisqu’on  est souvent amené à  retoucher la
structure, mais le temps est  utilisé à des choses plus constructives
qu’à lutter contre  la mise en page automatique —  et le résultat est
souvent plus cohérent et plus satisfaisant.

4. La productivité  est une notion très subjective :  lorsque je fais
quelque chose que  je trouve intéressant, j’ai  moins l’impression de
perdre mon temps que lorsque je suis contraint d’effectuer des tâches
répétitives  sans intérêt.  Les  comparaisons  de productivité  entre
LaTeX et LibreOffice ou Word sont assez nombreuses  sur le net et les
arguments ressassés souvent les mêmes. Si j’essaie de rester objectif
et concret, je peux dire que ma productivité est meilleure sous LaTeX
dans au moins trois cas :

- Lorsque je produis un contrôle avec corrigé, le contrôle, le barème
et le corrigé sont produits en même temps dans le même document grâce
à la classe exam.

- Lorsque je  veux produire  une version  pour  les  dyslexiques d’un
support écrit, il est très facile de ne fabriquer qu’un document avec
deux options  de construction (passage de  A4 en A3 et  changement de
police,  par  exemple).  Avec  le  système  de  références  internes,
les  changements  de  ligne  induits  par  la  nouvelle  police  sont
automatiquement  traduits  dans  les questions  qui  contiennent  des
références à un  passage. Il est peut-être possible de  faire la même
chose sous LibreOffice,  mais je n’ai jamais essayé.  Disons que sous
LaTeX, c’est assez simple.

- Pour économiser du papier, j’utilise  souvent une page A4 en format
portrait sur laquelle j’imprime deux pages A5 en format paysage l’une
sous l’autre  que je découpe  ensuite au massicot.  Sous LibreOffice,
j’imprimais deux feuilles  A4 avec une seule A5 en  haut, puis je les
superposais dans la photocopieuse afin d’obtenir ce que je cherchais.
Il  est peut-être  possible d’obtenir  directement la  page souhaitée
(avec les en-têtes et les pieds  de page) sous LibreOffice, mais cela
me  paraît  improbable. On  peut  certainement  utiliser un  logiciel
tiers de  manipulation des  pdf pour obtenir  le même  résultat, mais
l’utilisation de  LaTeX est ici beaucoup  plus simple et se  limite à
quelques instructions :

   \documentclass[12pt,a5paper,landscape]{exam}
   \usepackage{pgfpages}
   ........
   \pgfpagesuselayout{2 on 1}[a4paper]
   \begin{document}
   \mapage
   \clearpage
   \mapage
   \end{document}

- Il  suffit alors  d’écrire une commande  \mapage qui  contiendra le
texte à copier sur les deux pages A5, le tout tenant sur une page A4.

Voilà je  crois un assez bon  exemple d’un gain de  productivité très
net sous LaTeX.

Une conclusion donc : je continue l’an prochain !