LibreOffice et OpenOffice
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Date: 2011-02-06 16:20
Author: jdn06
Category: Formats libres
Tags: LibreOffice

Quelques mots  concernant le grand  sujet du moment, après  la sortie
des  deux  premières  versions stables  distinctes :  LibreOffice  vs
OpenOffice, ou plus exactement que penser de ce fork ?

Je n’aborderai pas la question du point de vue des développeurs ou du
modèle économique, car le sujet me dépasse largement. Le point de vue
développé ici  sera celui  de l’enseignant  qui essaie  de promouvoir
l’usage de  la suite  de bureautique  libre dans le  cadre de  sa vie
professionnelle.

Partons de la manière dont OpenOffice est perçu avant le fork.

Pour  les collègues,  les principales  résistances à  son utilisation
viennent :

- des  documents qu’ils ont  déjà produits en  .doc avec la  suite de
Microsoft  et  dont il  faut  refaire  la  mise  en page.  Ceci  dit,
Microsoft est  notre allié sur  ce point, car  la rétro-compatibilité
n’a jamais été leur fort. Il ne  suffit donc pas de payer une licence
pour n’avoir aucun problème de mise en page avec ses vieux documents.
Si LibreOffice parvient  à améliorer le rendu  des documents produits
sous Office, comme  il s’y est engagé,  les interventions nécessaires
sur la mise en page pourraient  devenir à peu près équivalentes entre
les deux  suites. Reste  à le  faire comprendre  à des  collègues qui
restent rassurés par la continuité de la marque Microsoft.

- de la  lenteur et de la  lourdeur du démarrage de la  suite. Il est
vrai  que  sous  Windows,  c’est assez  spectaculaire  alors  que  le
problème n’existe presque pas sous Linux. Ce n’est pas entièrement un
problème de pré-chargement du programme, car je ne pré-charge pas non
plus sous Linux et qu’activer le pré-chargement sous Windows améliore
la vitesse sans la rendre équivalente à ce qu’elle est sous Linux. Ce
n’est pas  non plus uniquement  lié à la  qualité de l’OS  (Linux, je
t’aime !!!), car la  différence entre Windows et  Linux est nettement
moins  sensible avec  Firefox,  par exemple.  La Document  Foundation
annonce des améliorations ; nous verrons bien.

-  du manque  de  fonctionnalités  de la  suite  libre.  Là, il  faut
distinguer entre  les collègues  qui n’y connaissent  pas grand-chose
et  concluent simplement  qu’une  fonctionnalité  n’est pas  présente
lorsqu’elle n’est pas  à l’endroit où ils la trouvent  sur Office, et
ceux,  plus  sérieux,  qui  regrettent les  limitations  de  Calc  ou
d’Impress.  Il faut  cependant dire  que la  plupart n’utilisent  que
Writer et  que cet argument  ne me  semble pas valable  concernant le
traitement de texte.

Le  nom d’OpenOffice  est  bien  connu de  la  plupart, mais  souvent
associé à de lointains essais sur des versions 1 ou 2 qui ne leur ont
pas  laissé un  bon souvenir.  La  plupart ne  le voit  que comme  un
logiciel  gratuit, bas  de gamme,  pour  les pauvres !  La notion  de
logiciel  libre n’est  que rarement  comprise. Le  changement de  nom
risque donc de ne pas changer grand-chose, ni en bien ni en mal.

Le cas des élèves de collège  est assez différent. Ils ne connaissent
généralement  pas OpenOffice  et ont  très  souvent à  la maison  une
version d’Office qui date  de l’acquisition de l’ordinateur. Certains
confondent Word et Wordpad ; d’autres confondent Office et Works. Les
questions de format et de conservation de  la mise en page ne se sont
jamais clairement posées pour eux.  S’ils constatent que ça ne marche
pas toujours, ils ne savent pas pourquoi.

Lorsqu’on leur demande  d’utiliser OpenOffice et le  format .odt pour
rendre un travail et qu’on  leur explique que télécharger le logiciel
en ligne est  légal et gratuit (ce qui pour  eux n’est pas intuitif :
téléchargement gratuit  = piratage,  forcément), ils sont  nombreux à
revenir le lendemain en me disant : « Votre logiciel, il est payant ;
je ne l’ai  pas téléchargé. » Quand je m’informe un  peu de ce qu’ils
ont fait, je m’aperçois qu’ils  utilisent tous Google comme moteur de
recherche, prennent le premier lien sans se poser de questions, alors
qu’il  s’agit d’un  lien commercial,  et se  voient proposer  par des
sociétés  qui  escroquent  l’internaute peu  doué  un  téléchargement
d’OpenOffice contre un SMS !

Pour  leur  redonner envie  d’essayer,  il  faut alors  leur  montrer
comment choisir le site sur lequel télécharger et le faire devant eux
sans payer par SMS !

Dans ces conditions, le passage  à LibreOffice est pour quelque temps
une aubaine puisque je ne crois pas que ce type d’arnaque existe déjà
avec ce nouveau nom…

Pour nous résumer, je crois que penser,  comme on peut le lire ici ou
là , que  l’affaire LibreOffice risque de  décrédibiliser le logiciel
libre dans les  milieux non libristes est assez erroné.  Cela ne peut
avoir cet  effet que chez les  fans de Microsoft qui  ont une opinion
sur le logiciel libre. La plupart des utilisateurs ignorent ce qu’est
le logiciel libre et ont une connaissance assez limitée d’OpenOffice.
Le changement en cours ne  saurait donc les perturber beaucoup. S’ils
sont utilisateurs  réguliers et  ne s’intéressent  pas au  libre, ils
poursuivront  les  mises  à  jour  d’Oracle sans  même  se  poser  de
questions tant que la suite reste gratuite.

Il  est cependant  un domaine  dans  lequel j’ignore  l’impact de  ce
fork :  il s’agit  des  entreprises travaillant  avec OpenOffice.  Je
crains cependant  qu’elles ne  soient pas  très nombreuses.  La liste
donnée  sur le  site  d’OpenOffice peut  paraître  fournie ; en  même
temps, imagine-t-on Microsoft composer une telle liste ?