GNOME-shell ou les occasions gâchées
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Date: 2011-06-02 10:51
Author: jdn06
Category: Logiciels libres
Tags: GNOME, KDE, Openbox, Tablettes

Le sujet commence à être  vraiment rebattu, mais j’ai préféré prendre
le  temps de  la réflexion  plutôt que  de hurler  mon indignation  à
chaud.

Pour moi,  le passage  à GNOME-shell  n’a pas  été un  choix. J’avais
testé  sur  mon netbook  un  live-cd  d’une  alpha  de Fedora  15  et
j’avais trouvé l’engin  élégant mais étais resté  perplexe devant ses
fonctions. A l’époque,  on répondait sur les  forums aux utilisateurs
inquiets, que tout n’était pas encore finalisé.

Puis un vent  de panique a commencé à souffler  sur les archlinuxiens
en  avril  avec  l’arrivée  de  GNOME-shell  dans  testing.  Tout  le
monde  commençait à  réaliser que  la logique  de la  rolling-release
était  impitoyable  et qu’à  moins  de  bricoler, il  faudrait  assez
vite abandonner  GNOME2. Début  mai, GNOME2 quitte  Archlinux ; après
quelques  jours  d’hésitation,   je  franchis  le  pas.   Et  là,  la
catastrophe.  Ayant lu  de virulentes  critiques d’utilisateurs  très
conservateurs, je m’étais promis de  l’essayer au moins 15 jours pour
lui  donner  vraiment  sa  chance. J’aurai  tenu  une  journée,  mais
j’ai  une circonstance  atténuante :  l’affichage bogue  méchamment ;
au-delà  de 7  ou  8 fenêtres  ouvertes,  les suivantes  apparaissent
entièrement noires, à moins de les réduire fortement. Bug dans Xorg ?
Insuffisance de  ma carte  graphique ? Problème de  pilote ? Toujours
est-il que ça rend l’interface inutilisable pour moi. En revanche, je
trouve les  fenêtres gtk3  très élégantes, mais  je peux  en profiter
sous openbox sans les inconvénients décrits.

Ne nous dérobons pas cependant. Que penser de GNOME-shell ?

D’un côté l’interface est vraiment innovante, belle et efficace.

D’un autre côté  elle souffre de deux défauts  pour moi rédhibitoires
que sont  l’absence de  personnalisation possible  et l’impossibilité
d’utiliser  du  matériel   un  tout  petit  peu   ancien.  Comme  ces
deux  points  sont pour  moi  indissociables  de  mon goût  pour  les
distributions  Linux,  j’ai  du  mal  à considérer  que  ça  ne  soit
qu’une  contrepartie aux  avancées graphiques  du projet.  Après tout
enlightenment,  openbox ou  xfce  parviennent aussi  à des  résultats
esthétiquement aboutis sans  sacrifier la légèreté. Mais  il est vrai
qu’avec GNOME-shell, on  a l’impression d’entrer dans  un autre monde
qui ringardise un peu ceux que je viens de nommer.

En  même temps,  au-delà  même des  limites  techniques évoquées,  je
reste sceptique  sur l’aspect  pratique dans le  cas de  mon desktop.
Essayer de dépasser  le « J’aime pas » oblige au  fond à s’interroger
de  manière  plus générale  sur  ce  qui  me  plaît et  déplaît  dans
les  différentes  interfaces  graphiques  que j’ai  pu  utiliser.  Je
peux  partir par  exemple de  ma stupeur  lorsque j’entends  dire que
l’interface graphique de  Windows 7 est idéalement conçue  ou que KDE
est de loin meilleur que GNOME2. Je ne veux pas nourrir quelque troll
que  ce soit  mais expliquer  pourquoi j’aimais  GNOME2 et  détestais
Windows XP,  par exemple. En gros,  je m’aperçois que je  ne supporte
pas de passer par de nombreux sous-menus pour arriver à lancer ce que
je  veux. D’autant  qu’une  erreur d’embranchement  oblige souvent  à
recommencer  du début.  Ce que  j’aime  en revanche,  c’est avoir  le
lanceur  directement accessible.  Sous  GNOME2,  j’avais donc  chargé
mon  panneau du  haut  d’un très  grand nombre  de  lanceurs, ce  qui
n’est  plus possible  sous  GNOME3. J’aimais  aussi  les trois  menus
déroulants qui économisaient  un niveau (celui qui  permet de choisir
entre Applications, Raccourcis et  Préférences du système), lorsqu’il
fallait malgré  tout utiliser les  menus. Windows ou KDE,  en plaçant
tout (menu, lanceurs,  barre de tâches, zone de  notification) sur un
seul  panneau et  à partir  d’un  seul bouton  menu, me  paraissaient
étouffants. Ces interfaces me  semblaient faites pour fonctionner sur
les 15 pouces  d’autrefois, afin de laisser de la  place aux fenêtres
ouvertes. Aujourd’hui,  ça n’a plus  de sens ; autant profiter  de la
place que nous laissent nos écrans.

A part en utilisant l’outil de recherche où taper le nom de l’appli à
lancer,  très  pratique  et  bien  conçu,  GNOME-shell  oblige  à  de
nombreuses manipulations à la souris  qui me semblent assez absurdes.
Mais le  paradoxe est qu’il  apparaît en  revanche tout à  fait idéal
dans le  cas d’une utilisation  tactile : mouvements plus  que clics,
grosses  icônes  s’étalant  sur  tout le  bureau  plutôt  que  petits
menus  et  sous-menus.  Malheureusement,  à  ma  connaissance,  aucun
projet allant en  ce sens n’est actuellement  développé. L’outil sera
certainement  très  bon,  mais  il  se  trouve  pour  moi  utilisé  à
contre-emploi. Peut-être peut-on voir  dans ce choix des développeurs
l’influence d’une  idée à mon  avis pernicieuse, assez dans  l’air du
temps, qui  voudrait unifier  les interfaces  graphiques de  toute la
nébuleuse d’appareils,  la plupart  mobiles, qui tendent  à compléter
voire remplacer  la tour de bureau.  Il est certain que  la stratégie
longtemps suivie par Microsoft qui voulait mettre son bouton démarrer
et ses menus sur tous les  appareils mobiles était assez absurde ; le
client s’y retrouvait,  mais ne s’y plaisait pas. A  contrario, je ne
suis pas sûr  que vouloir imposer à ce stade  une interface graphique
de tablette pour  des postes destinés à la  bureautique soit beaucoup
plus pertinent.