Ces deux dernières années, j’ai essayé pas mal de gestionnaires
graphiques, principalement intéressé par ceux qui se présentaient
comme très légers, afin de pouvoir les utiliser sur des machines
anciennes ou virtuelles. Les deux qui m’ont le plus séduit, dans
cette catégorie, sont sans conteste Enlightenment et Openbox. Si le
premier avait mes préférences l’an dernier, c’est le second que
j’utilise le plus aujourd’hui. Je vais essayer de présenter ce qui
fait à mes yeux leurs atouts respectifs.
BEAUTÉ, EFFETS VISUELS ET PERFORMANCES
La question est évidemment subjective et les thèmes, très nombreux
dans les deux cas, multiplient les possibilités de trouver chaussure
à son pied.
Là où Openbox a un côté minimaliste zen, Enlightenment arrive
par défaut avec une série de thèmes assez bling-bling, mais pas
désagréables pour autant. D’autres thèmes existent par ailleurs.
Ajoutons que les performances d’Enlightenment sont plus
impressionnantes : la fluidité des transitions, par exemple en
passant d’un bureau à l’autre, est très belle même sur une machine
très limitée. Pour obtenir la même chose sur Openbox, il faut activer
un gestionnaire de composite (genre cairo-compmgr) et la machine perd
beaucoup en légèreté et en stabilité…
L’OCCUPATION EN MÉMOIRE
Je ne prétends pas ici faire un benchmark rigoureux, mais simplement
faire part des chiffres que j’obtiens après démarrage de la machine
sous divers gestionnaires graphiques. Les pourcentages donnent la
fraction de mémoire occupée par l’application et le chiffre qui suit
free est la quantité de mémoire totale restée libre, exprimée en Ko,
sachant que l’ordinateur concerné dispose d’un giga de RAM.
Openbox & tint2 : (version spartiate, donc…) :
X 1.1%
openbox 0.8%
tint2 0.7%
----------
TOTAL 2,6%
free 544864 libres
Openbox & tint2 avec cairo & xcompmgr :
X 1.1%
cairo-dock -o 3.2 %
openbox 0.8
tint2 0.7
xcompmgr -c 0.2
----------
TOTAL 6%
free 507080 libres
Enlightenment :
X 1%
enlightenment 3.5 %
lib enlightenment 0.3
----------
TOTAL 4,8%
free 518000 libres
À titre de comparaison, XFCE :
X 1.2%
xfce4-panel 2
xfdesktop 1.7
xfwm4 1
xfce4-session 0.7
thunar –daemon 0.6
xfsettingsd 0.4
xfce4-settings-helper 0.4
----------
TOTAL 8%
free 494528 libres
Openbox est donc largement devant si l’on se contente du strict
minimum, mais à effets graphiques équivalents, Enlightenment
l’emporte assez largement.
STABILITÉ
Openbox n’a jamais été pris en défaut durant les mois où j’ai
travaillé avec. Enlightenment est nettement plus capricieux,
notamment du fait du développement continuel qui a longtemps eu
pour conséquence l’absence de version stable dans la branche e17.
Sous Archlinux, par exemple, la mise à jour régulière du svn
était à l’origine de nombreux problèmes, dont le plus évident
était l’obsolescence soudaine de certains morceaux essentiels, non
remplacés sur le moment par une nouvelle application : entrance
(l’équivalent de gdm ou de slim), par exemple, a cessé d’être
développée un beau jour sans prévenir. Résultat : l’application
installée ne permettait plus de lancer une session mise à jour
d’Enlightenment. Elsa, qui doit le remplacer, n’existe toujours pas
en version stable, plus d’un an après.
Il m’est arrivé aussi plusieurs fois d’avoir à supprimer tous les
fichiers de configuration contenus dans home/…/.e afin de pouvoir
démarrer, le remplacement de certains programmes bloquant sinon le
démarrage de la session.
Ceci dit, la situation semble s’être un peu améliorée depuis le
passage d’e17 en 1.0.
Pour être juste cependant, il faut aussi parler des petits problèmes
liés à l’utilisation d’un gestionnaire composite et d’un dock de
type cairo-dock avec Openbox, programmes qui ajoutent une certaine
instabilité. Avantage cependant de cette solution : les éléments sont
bien séparés les uns des autres et peuvent être tués et redémarrés de
manière indépendante sans avoir à redémarrer la session.
FACILITÉ D’USAGE ET DE CONFIGURATION
Dans un premier temps, la bataille semble perdue pour Openbox, et
cela m’a retenu un bon moment de vraiment m’y plonger. Openbox arrive
complètement nu : pas de panel, un grand écran vide avec un menu
accessible par le clic droit, mais qui n’aide pas beaucoup puisqu’il
ne contient qu’une collection de lanceurs par défaut sans rapport
avec ce qui est installé sur la machine. Tout reste à bâtir.
À l’opposé, Enlightenment s’utilise très bien out of the box : la
barre se trouve en bas de l’écran et le menu permet de lancer les
applications installées.
Il ne faut pas cependant en rester à cette première impression.
Openbox est extrêmement bien documentée et sa personnalisation se
fait de manière simple, cohérente et logique par quelques fichiers de
configuration contenus dans le home. Les changements peuvent être
testés sans avoir besoin de relancer la session. En cas d’erreur,
rien ne bloque. Pour un archlinuxien, cette façon de faire s’intègre
parfaitement au reste du système et mérite incontestablement la
qualification de KISS.
Enlightenment me semble beaucoup plus contestable dans ses choix. Une
précision avant de continuer ; ce qui suit est assez critique vis à
vis d’un projet que j’aime beaucoup et auquel je n’ai pas du tout
pris la peine de contribuer, pas même par un rapport de bug. Il ne
s’agit pas de râler ou de se plaindre, mais juste de présenter mon
point de vue subjectif sur les points forts et les points faibles
pour l’utilisateur que je suis.
Pour faciliter la configuration, tout se fait de manière graphique
(si quelqu’un a trouvé des infos sur une édition des fichiers de
configuration, qu’il me mette un lien en commentaire !) D’ailleurs,
la presque totalité des fichiers de configuration présents dans
home/…/.e/ sont des fichiers non éditables de type .cfg. Si j’ai bien
compris, Enlightenment tire en partie sa force de cette compilation
des fichiers de configuration, mais cela rend leur édition impossible
sans passer par la configuration graphique. Je ne suis pas du tout
allergique à cette manière de faire, loin de là. Le problème est que
l’outil graphique de configuration est à la fois labyrinthique et
très peu ergonomique à mon goût.
Les menus sont assez foisonnants et étroits, mais surtout leur
organisation n’est pas des plus intuitives (et la documentation reste
assez pauvre ou alors obsolète).
Un exemple : pour installer une extension (appelée module dans le
langage Enlightenment) dans le panel (appelé rack), il ne faut pas
éditer le rack, mais éditer d’abord les modules, activer ceux dont on
a besoin, puis éditer le rack et y activer le module voulu. La
configuration du menu n’est guère plus aisée (ajout d’un lanceur
personnalisé, par exemple).
Pour moi, si un outil graphique n’est pas intuitif, alors il est
beaucoup plus pénible à utiliser qu’un fichier de configuration bien
documenté.
Openbox fait un peu peur au début, mais il est beaucoup plus souple à
l’usage qu’Enlightenment.
Autre avantage, il se limite à quelques tâches (l’ouverture de la
session, l’affichage des fenêtres et le menu), ce qui permet
de choisir les outils qu’on veut utiliser avec (le panel, le
dock, le gestionnaire de bureau, le menu dynamique etc.) De plus,
quelques outils graphiques minimalistes ont été créés qui permettent
simplement d’éditer les fichiers de configuraton de manière plus
conviviale : obconf, obmenu…
Bref, Openbox a les qualités de ses défauts et Enlightenment doit
encore progresser sur le troisième point pour devenir pleinement ce
qu’il promet d’être : un système beau, léger et fonctionnel.