Publié le 16 février 2015

Le groupe arriva enfin, au village, fatigué.
Daenran, regarda à droite et à gauche, puis dit simplement
— Cherchons l'auberge.
— Elle devrait être à droite, déclara Miyll.

Garrim, ne répondit pas. Il huma l'atmosphère, puis il se mit à foncer à gauche, en hurlant « BOISSON !!!!! ».
Alannaria eut à peine le temps de faire un pas de côté, afin d'éviter le tank qui lui fonçait dessus [1].

— Et bien, quel enthousiasme, déclara-t-elle, en époussetant sa tunique verte d'un geste ample, et gracieux.
— Suivons-le, avant qu'il ne déclenche encore une catastrophe.

Le nain ricana, une bière à la main, en voyant entrer le reste du groupe dans la taverne.

— Vous en avez mis du temps, j'en suis déjà à ma troisième choppe !

Daenran, le regarda, puis regarda la salle. À part eux et le tenancier, ils étaient seuls.

— J'ai déjà réservé les chambres et commandé pour vous, pendant que vous trainiez.
— C'est vrai, ça, demanda Miyll au patron de la taverne.
— Oui, deux chambres, pour quatre personnes. J'avoue que cela m'a surpris. Je ne m'attendais pas du tout à ce qu'il me demande cela. Ça doit être la première fois en vingt ans que je vois un Nain penser à ses compagnons de route.
— Il est un peu… spécial, dirons-nous, dit simplement Miyll. Combien pour les chambres, le repas et la boisson ?

L'aubergiste manipula une étrange machine, qui se mit à grogner [2]. Quelques secondes plus tard, il en sorti un parchemin, dont le contenu ressemblait à ceci :

L'auberge du joyeux voyageur.
3 rue d'Avou, Emoges.

2 chambres doubles à 8 Po l'unité
1 pichet de vin à 2 Po l'unité
2 jus de fruits à 3 Pa l'unité
1 tonnelet de bière à 7 Po l'unité
2 salades composées à 4 Pa l'unité
2 terrines à 1 Po l'unité
1 saucisson à 5 Pa l'unité
--------------------
Total : 28 Po et 9 Pa

Merci de votre visite, et à bientôt.


— Alors, 28 Po et 9 Pa.
— Tenez, voilà 30 Po. Gardez la monnaie.
— Merci beaucoup. Passez une bonne soirée.

Miyll récupéra le reçu, et le rangea dans une petite pochette. Puis, elle rejoignit le groupe, déjà attablé.

— Encore combien de jours de marche avant d'arriver à Thueyieu, demanda Alannaria.
— Quatre jours de marche, répondit Daenran. Sauf, si vous nous refaites le même coup que tout à l'heure.
— Maieuh, je trouvais ça triste, des poneys pas coiffés.
— Tu nous as fait perdre une heure, dans la forêt, pour coiffer les poneys. Heureusement qu'on t'a emporté de force, on a cru que tu n'en finirais jamais, dit Daenran.
— Ouais, c'est vrai, déclara Garrim. Un peu plus, et tu coiffais aussi les lapins. Ha ha ha ha.
— C'est même pas vrai, d'abord. Les lapins savent se coiffer eux-même, répondit Alannaria. Et qui a dit qu'il ne voulais pas entrer dans la forêt ? Hein, qui ?
— Et ça recommence, soupira Miyll.
— Je voulais pas entrer dans la forêt. C'est plein d'arbres, et il n'y a pas de minerai, ni un bout de granite à piocher. C'est donc pas un endroit pour les Nains.
— Résultat, tu nous as aussi fait perdre une heure, en argumentant qu'il fallait contourner la forêt, et qu'il fallait aller vers le nord.
— C'était pas un long détour, à peine deux jours de marche. En plus, on aurait pu passer à la mine, pour faire affûter ma hache. Elle sonne zboïng et non zoïng, quand je la sors de son fourreau. En plus, j'ai pas gagné mes dix points d'expérience en la traversant, la forêt.
— Vous savez qu'on doit arriver le plus rapidement possible, sinon on ne saura pas en quoi consiste cette mission [3].
— J'ai pas envie non plus que cette compagnie, c'est quoi son nom déjà ? Les Clefs de Bras ? Les Clefs de Hache ? Les… Les trucs quoi, nous piquent encore une mission, déclara Garrim, en se resservant une choppe au tonnelet posé à côté de lui.
— Aucune chance que cela n'arrive. Cette mission n'est pas pour leur niveau. C'est au moins du niveau 8.

Le groupe termina le repas sans aucun incident [4], puis ils montèrent se coucher.

Arrivé devant la porte, Miyll demanda à Daenran.

— Où va-tu ? Ta chambre, c'est de l'autre côté du couloir.
— Bon, au moins, j'aurais essayé.
— Avoues que tu voulais dormir avec Alannaria.
— Qu'est-ce qu'il se passe, entendit-on à travers la porte.
— Rien, je discute avec le chef de groupe, dit Miyll, avec une pointe d'ironie sur « chef de groupe ».
— Ah, d'accord, répondit Alannaria.
— Plus sérieusement, pourquoi ne pas utiliser un sort de téléportation, demanda Daenran. On arriverait beaucoup plus vite.
— Je n'ai pas de sorts le permettant, et en ce moment, les courants telluriques sont trop élevés pour garantir la réussite d'un déplacement.
— Pourquoi ne pas le faire la nuit, alors ?
— Parce que de nuit, on n'a aucun repère visuel. Tu voudrais te retrouver au milieu de l'océan ou perdu dans les montagnes ? D'ailleurs, comment sais-tu que ces courants sont faibles la nuit ?
— Mmm, juste une intuition, répondit Daenran, avec un grand-sourire.
— Cette information n'est pas censé être connu des non mages. Mais, je me satisferai de cette réponse. Il y a encore plein de choses que nous ignorons les uns des autres. Après tout, cela ne fait que trois ans que nous parcourons ces terres ensemble.
— Ne rien connaître du passé de ses compagnons n'est pas forcément une mauvaise chose. Bonne nuit.
— Bonne nuit, répondit Miyll.

Sur ces mots, Daenran rejoignit sa chambre, où Garrim dormait déjà.

Le lendemain matin, après un copieux petit-déjeuner, le groupe se remit en route.

Au bout d'une heure de marche, ils arrivèrent près de Les Kluz [5] [6]. Après avoir attendu que le bateau qui s'était engagé passe de l'autre côté de Les Kluz, ils traversèrent le pont qui s'était remis en place, et arrivèrent dans…

Le marais démoniaque [7]

— Mais pourquoi on doit passer à travers ce marais, demanda Alannaria.
— J'ai besoin de quelques plantes des marais, pour préparer une potion, dit simplement Miyll. En plus, ce marais étant sur notre route, autant en profiter.

Miyll s'arrêta en effet à plusieurs reprises, pour couper des plantes et autres tiges, en marmonnant dans une langue semblant inconnue [8].
Arrivés à peu près au milieu du marais, Miyll imposa le silence complet, et se jeta au sol. Ses compagnons en firent autant. Elle chuchota.

— Un dragon des marais est endormi au milieu du chemin et nous barre la route.
— On peut le battre ?
— Tu es fou ? Il doit être au moins au niveau vingt-cinq.
— Et alors ? On est tous au niveau sept ou huit. On a au moins une chance.
— En tenant compte du théorème de Plouf Plouf, et de la théorie de la main gauche, on doit additionner tous nos niveaux, ce qui donne trente. Puis, on doit retirer un tiers, ce qui donne alors vingt. À ce niveau, si on l'attaque tous en même temps et que l'on effectue tous une réussite critique, on a seulement une chance sur quatre de le tuer.
— Et si ça échoue ?
— Si l'un de nous fait un fumble, c'est le dragon qui a une chance sur quatre de tous nous tuer en un coup.
— Et est-ce qu'il a au moins un point faible, demanda Garrim.
— Soit la tête, soit le ventre. Mais il faudra traverser les écailles, qui forment une cuirasse, pour une attaque physique.
— Et au niveau magie ?
— Un sort de glace devrait l'immobiliser, à moins de geler ce marais sur une surface d'une centaine de mètre-carrés, pour pouvoir l'achever. Mais ça nécessite de préparer le sort pendant une demi-heure, pour un mage de niveau dix-huit. Tous les autres sorts sont inefficace, y compris le contrôle mental.
— Et donc, qu'est-ce qu'on fait ? On fait demi-tour ? On le contourne ? On reste là et on attend la nuit avant de pouvoir passer ?
— Espérons seulement qu'il ne nous ait pas vu, dit simplement Daenran.

À ce moment, le dragon se réveilla, et s'étira. Le groupe vit alors un beau dragon des marais, un mâle, d'une dizaine de mètre de long pour trois mètre cinquante de haut.

— Il est niveau trente. On n'a aucune chance, dit Miyll.

Le dragon regarda alors en direction du groupe. Il parut surpris de voir ces petits bipèdes si proche de lui. Après un moment d'hésitation, il se dit que le repas était présenté sur un plateau, et qu'il n'avait plus qu'à se servir.

Garrim s'aperçu le premier que le dragon les avait repérés.

— Il nous a vu ! Tant pis, à l'assaut !

Le nain commença à s'élancer, mais Daenran le retint de justesse.

— Ne fais pas de folie. Préparons-nous plutôt à fuir. À mon signal.

La tension était à son comble. Le dragon s'avançait, était de plus en plus proche. Quand soudain…

Une chaise [9] tomba sur la tête du dragon.
Celui-ci, à moitié assomé, regarda ce nouvel assaillant.

Daenran hurla

— Maintenant !

Le groupe prit alors la fuite [10], profitant de la diversion.
Le dragon, dans un moment de colère, propulsa la chaise de nouveau dans les airs, d'un violent coup de patte. La chaise se retrouva de nouveau dans l'espace. UCDLE.

Pendant ce temps, la compagnie de Mazarnizil était sorti du marais. Le dragon ne semblait pas les pourchasser.

— C'est bon, on est suffisamment loin. On peut s'arrêter, dit Miyll.
— D'où venait cette chaise ? Demanda Alannaria.
— Aucune idée. L'important, c'est que l'on soit saufs.
— Saufs ? Sauf que quoi ?
— Mais non, saufs, sauvés. Arrête de faire l'elfe stupide.
— Vous n'allez quand même pas vous chamailler dans un moment pareil ?

Voyant une grange, un peu plus loin, Alannaria proposa d'y faire une pause. Le groupe s'y arrêta.
Après avoir pris leur repas, ils décidèrent de se reposer un peu.

Tout allait bien, jusqu'à ce qu'une tortue en bronze se mette à léviter avant de retomber lourdement au sol. Puis, ce fut au tour d'une chaise [11]. Celle-ci sembla hésiter, puis décida de voler à travers la porte, puis pris de l'altitude.
Daenran, à moitié endormi, demanda à Miyll d'arrêter de jouer avec ses sorts. Elle répondit que c'était les chats qui s'amusaient et non elle. Daenran se retourna en haussant les épaules… les chats. Pourquoi pas des lapins qui sortiraient de chapeaux hauts-de-forme tant qu'elle y est.


1 : Un nain, fonçant tête baissée, hache en avant, ressemble vraiment à un tank. Mais, ai-je besoin de l'expliquer ?
2 : Une caisse enregistreuse automagique avec impression sur parchemin. Une machine à la mode en ce moment chez tous les commerçants.
3 : L'auteur non plus ne le sait pas. Je ne l'ai pas encore décidé, et visiter un donjon à la recherche d'objet magique, c'est trop courant et vraiment SOCQATOA. Déjà que cette histoire est conforme à ce schéma…
4 : Chose rare, mais pouvant s'expliquer par le fait qu'ils étaient seuls, et donc, que personne n'irait les déranger, ou surtout, déranger Garrim.
5 : Les Kluz. Il s'agit d'un mot gobelin qui a été retranscrit tant bien que mal. À cette époque, les linguistes n'étaient pas très répandus. Au moins, ils n'ont pas inventé de mots ridicules comme « arrière-guichet » ou « costumade ».
6 : Une invention gobeline utilisée au quotidien. Contrairement aux autres qui finissent par exploser, celle-ci était, au contraire, bien conçue, et simple d'utilisation. Elle permet aux bateaux de franchir des dénivellations. Le seul problème, c'est au niveau de la signalisation. En effet, les gobelins ne voyant que des tons de vert, ils ont donc simplement placés deux lanternes vertes pour indiquer si les bateaux peuvent s'engager ou non dans Les Kluz.
7 : Les joies d'utiliser un générateur de nom pour les lieux. Parfois, le résultat est au delà de mes espérances.
8 : Il s'agissait simplement du nom de ces plantes. Des savants un peu fous avaient décidé d'utiliser une vieille langue morte pour nommer la faune et la flore.
9 : Vous l'aviez oublié ? Il s'agit de la chaise qui fut envoyée dans les airs dans UCDLE 3, par la catapulte des gobelins. Elle ne retombe que seulement maintenant.
10 : Comme d'habitude. C'est d'ailleurs grâce à ça qu'ils ont survécus jusqu'à maintenant.
11 : Ça ne vous rappelle rien ? Dans le cas contraire, relisez UCDLE 4.